Thara Saint-Hilaire ou le journalisme au service des droits humains

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Thara Saint-Hilaire est de celles qui cherchent à inscrire leur métier dans une dynamique de combat. Combat pour mieux apprehender la vie comme un espace à vivre. Combat pour un monde plus aimant où tout un chacun puisse disposer de sa vie comme bon lui semble. Thara L. Saint-Hilaire est de cette galerie-là. Elle fait de son métier de journaliste une arme pour s’attaquer aux problématiques qui minent la vie des femmes partout dans le monde, notamment en Haïti.

Actuellement en formation en Sciences Po à CEDI et en Lettres Modernes à l’École Normale Supérieure, Thara L. Saint-Hilaire professe également comme journaliste. J’ajoute engagée, pour être correcte. Car pour ce qui la concerne, journalisme et engagement sont deux perles d’un même collier. Même si l’engagement, à l’entendre parler, de quelques pas, précède le journalisme. « J’avais toujours quelque chose que je voulais pointer du doigt ou dénoncer. Et l’école, par le canal de son journal scolaire, m’avait permis de faire passer mes messages, de m’extérioriser », explique la jeune femme. Engagement précoce, donc, puisqu’elle n’a été qu’en 3e secondaire. Alors que la volonté de dénoncer n’arrêtait pas de la suivre à la trace, s’est construit petit à petit chez Thara un goût pour le journalisme. Cette orientation professionnelle est un véritable Ring où elle livre de sérieux combats contre tout ce qui entrave la vie des femmes, des filles et de la communauté LGBTI en Haïti.

Thara a publié sur Plimay les premiers textes, plus littéraires, qui l’ont fait connaître. Depuis elle multiplie des articles_qu’elle dit être mieux en écho avec ce qu’elle a de l’intérieur_ qui concernent les droits humains en général, et qui touchent en particulier les droits des femmes.

Le travail de Thara est valorisé pour sa pertinence. Certaines institutions offrant des bourses de création, touchées par leur originalité, approuvent ses projets et lui offrent des résidences en vue de disposer d’un meilleur espace et de moyens financiers suffisants pour mener à bien ses travaux. Elle a décroché une bourse résidence pour un travail de trois articles sur les viols correctifs au Centre Pen Haïti dans le cadre du programme Droits de l’Homme et perspectives de femmes. Elle vient tout juste de décrocher la bourse de création Arnold Antonin pour ce même sujet qui lui tient à cœur, mais autour duquel pour la deuxième résidence évoquée, dit-elle, elle va faire un film documentaire sur un couple de lesbiennes qui subit un viol correctif.

Rencontre avec le féminisme

« Le féminisme, c’était à la maison déjà», dit la coordinatrice de l’association féministe Gran Jipon. Elle explique que quand elle se plaignait de ce qu’elle voyait comme anormal dans ce que vivent les femmes, son père lui sortait toujours cette phrase : tout se gagne au prix de combat. Cette phrase de son père l’a travaillée et poussé à combattre. « À l’école, je militais déjà. Je m’affirmais féministe à travers ce que je produisais comme texte. Mais aussi, dans mes positions lors des débats», avance Thara, qui dit souhaiter vivre dans une Haïti où les femmes et les filles ne sont plus des proies.

« La route sera longue, mais l’on parcourt déjà du chemin. .Toi et moi on avait de droits que ceux d’un sac de patates», dit Thara toute riante. « Si nous sommes là, entrain de faire cette entrevue, sans la présence d’un homme pour nous dicter quoique ce soit, c’est beaucoup », argumente-t-elle tout en remerciant les aînées qui se sont battues.

Thara se réjouit du fait qu’il y a des avancées en matière des droits des femmes. « Mais le travail doit continuer », dit celle qui a un respect particulier pour le travail de la sociologue et féministe Sabine Lamour.

Thara dit regretter que les conditions politiques qui sont celles du pays ne sont pas du tout favorables au combat des femmes : « C’est du bâclage », dit-elle. « On peut manifester pour le respect du droit à l’avortement, par exemple. Mais s’il y a un gouvernement de facto comme on l’a aujourd’hui, on ne pourra rien. Où les lois vont elle être votées ? », se plaint la féministe, qui appelle les gens à s’impliquer pour une Haïti où le respect des droits de la personne puisse être garanti.

Les viols correctifs

«Les viols correctifs sont des viols faits sur les lesbiennes dans le but de les faire changer d’orientation sexuelle. C’est supposé être le remède miracle contre l’homosexualité. En tant que journaliste c’est une pratique que je pense qui doit être pointée du doigt afin que des solutions spécifiques soient prises pour résoudre ce problème. Ces articles permettront de créer de la documentation autour de ce sujet, de faire des plaidoyers et des sensibilisations pour éradiquer cette pratique barbare et moyenâgeuse. »

Adlyne Bonhomme


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