Née à Port-au-Prince, Isabelle Théosmy a vécu toute sa vie à Carrefour-Feuilles, où elle
a récemment perdu sa mère dans le massacre du 13 au 24 août dernier. Auteure de deux
précédents romans, « Mon amour, mon geôlier », « Nos années manquées », Isabelle
Théosmy compte un troisième roman « L’amour arrive à temps » paru aux Éditions
Varella pour la rentrée littéraire de novembre 2023. Entretien avec l’auteure au sujet de
son parcours et de ses ouvrages.
Mus’elles : Pouvez-vous me raconter votre parcours scolaire et vos choix d’études ?
Isabelle Theosmy : Ma plume a été forgée par les sœurs de Saint Joseph de Cluny, qui
dirigeaient le Centre Anne Marie Javouhey où j’ai fait mes études primaires. Située à la 4ème
Avenue Bolosse, cette école vieille de dizaines d’années, a-t-elle aussi été obligée de vider les
lieux, sous les menaces récurrentes des gangs armés de Grand Ravine.
J’ai passé mes deux premières années d’études secondaires au Cœur Immaculée de Marie
(CIM), pour ensuite intégrer le Collège de Jeunes Filles (CJF), où j’ai terminé mes études
classiques. J’aimais la médecine, mais beaucoup avaient déjà pressenti en moi une femme de
lettres. J’ai étudié la communication sociale à la Faculté des Sciences Humaines de
l’Université d’État d’Haïti (Fasch/UEH). J’entame actuellement, une formation diplômante
pour l’enseignement du français langue seconde.
M.E. : Qui êtes-vous quand vous n’écrivez pas ?
I.T. : Avec un esprit libre, Isabelle n’a pas de routine. Je fais le plus souvent ce qui me plaît
dans un temps T. Un monde meilleur pour tous, les droits humains me tiennent énormément à
cœur. Ma famille compte beaucoup pour moi. J’ai une fille de 14 ans, qui est le plus beau
cadeau que m’ait fait la vie. J’aime la musique, le septième art, si bien que j’ai des velléités à
étudier l’écriture scénaristique.
M.E. : Comment êtes-vous entrée en contact avec l’éditeur pour publier votre premier
livre ?
I.T. : Et, oui! En 2020, via le même procédé qui m’a été reproché par un ami écrivain très
connu, j’ai déposé un manuscrit qui a reçu pour mon plus grand bonheur un contrat d’édition.
Je n’ai pas été référencée. Et, je fais partie des rares écrivains en Haïti à voir leur toute
première œuvre publiée à compte d’éditeur. Dès cet instant, le sentiment que je peux écrire,
que je dois continuer, ne me quitte plus.
M.E. : À partir du moment où vous avez publié votre premier ouvrage, vous a-t-il été
plus facile de publier ensuite ?
I.T. : Je ne vais pas dire que c’était facile de publier ensuite. Car, il a fallu faire beaucoup de
recherches, souvent, infructueuses. Suivre les instructions et les consignes de chaque maison
d’édition. Et surtout, le temps d’attente est particulièrement long. J’ai aussi refusé des contrats
d’édition. Car, il faut faire attention pour ne pas se jeter dans n’importe quelle aventure. Les
maisons d’édition « en-veux-tu en voilà » sont de véritables pièges pour les jeunes auteurs en
quête de se faire éditer.
M.E. : Où peut-on trouver vos livres ?
I.T. : Ce n’est plus un secret, l’instabilité en Haïti a un impact négatif sur toutes les sphères de
la vie publique. Cependant, le secteur culturel est l’un des plus gravement touchés. Je promets
que d’ici 2024, mes livres seront disponibles en Haïti, pour ceux qui patientent depuis des
années maintenant. Mais, pour l’instant, mes livres sont disponibles sur toutes les plateformes
de ventes en ligne, dont Amazon, où j’ai un compte où, les intéressés peuvent s’abonner, en
cliquant sur mon nom.
Mus’elles : Quels conseils donneriez-vous aux auteurs en devenir ?
Isabelle Théosmy : Beaucoup de maisons d’édition reçoivent directement les manuscrits en
ligne. J’encourage ceux qui écrivent de ne pas hésiter à acheminer leurs textes. Le métier
d’écrire demande énormément de courage. C’est aussi se mettre à nue et de ne pas avoir peur
d’être jugé, ou rejeté. J’aime à le dire: « Je continuerai à écrire même si j’étais la seule à me
lire. »
Propos recueillis par Garens Jean Louis
jgarens2@gmail.com
