Lecture de “Peau, à propos de sexe, de classe et de littérature” de Dorothy Allison

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C’est en Caroline du sud dans un état profondément ségrégationniste, homophobe et classiste que nait Dorothy Alisson. Aînée de trois enfants, sa mère tombe enceinte à 15 ans et s’installe quelques années plus tard avec celui qui deviendra le beau père d’Allison. Un homme violent qui abusera d’elle et pour lequel elle nourrira une haine profonde qu’elle aborde dans plusieurs de ces ouvrages.

Originaire d’une famille ouvrière, c’est cependant loin de ce qu’elle appelle la “description romantique de la pauvreté” qu’elle grandit. En effet, très tôt, elle se rend compte du regard que posent sur elle et sa famille les autres habitants de la communauté et c’est dans l’enfance qu’elle commence à questionner le rapport entre le jugement que les autres portent sur elle en y faisant un lien avec les moyens dont disposent sa mère et son beau-père.

Dans son recueil d’essai: Peau, à propos de sexe, de classe et de littérature, Allison revient sur son enfance, la proximité qu’elle a eu très tot avec les armes à feu dans un pays où les morts par balles sont legion, et son long cheminement pour vivre pleinement et sereinement sa sexualité. Féministe radicale, Alison s’est tres tot ralliée à la cause des travailleuses du sexe afin de le dépénaliser et de laisser libre cours à des discussions sur la sexualité et la disponibilité de cette dernière via divers canaux de diffusion dont la pornographie.

Publié pour la première fois en 1994, Peau est divisé en plusieurs chapitres. Il s’évertue au final à raconter comment la littérature à été un exutoire dans le parcours d’Alison afin d’affronter ses propres émotions vis à vis de sa famille: sa mère et ses soeurs, mais aussi son beau père. Celle qui avait eu peur pendant longtemps de parler librement de son enfance, de ses problèmes économiques et de la violence de sa réalité a pu, grâce à la littérature affronter sa peur de revenir sur son passé et d’aborder les sentiments qui accompagnent ceux que la philosophe française Chantal Jaquet appelle les transfuges de classes.

Témoin de la violence physique autant que de la violence systémique du capitalisme, l’autrice revient aussi sur la lesbophobie dont elle a été victime à l’extérieur comme à l’intérieur des communautés féministes qu’elle a fréquentées. Non exempt du sexisme que beaucoup de ces femmes ont pu intérioriser sans le savoir. Elle pointe le danger que représente cette forme particulière d’homophobie qui divise les pratiques sexuelles par le même prisme hétéronormatif hérité du patriarcat et de la religion: d’un côté les pratiques “normales”, et de l’autre les pratiques “perverses”.

Pour les féministes, il semble tout simplement dangereux d’étudier l’imaginaire sexuel. Le sexe est imprévisible, irrationnel, sournois et d’une portée considérable. Pire encore, il résiste complètement au légalisme simple ou aux catégories philosophiques. Une grande part de l’imagerie sexuelle ne se satisfait pas d’une interprétation unique mais d’un éventail de significations à différents niveaux, qui dépendent du contexte, des goûts personnels et du symbolisme dont elle se pare.

Melissa Béralus


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