Entre les lignes de “Chère Ijeawele, ou un manifeste pour une éducation féministe” de Chimamanda Ngozi Adichie

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Le sujet de la maternité  se pose de plus en plus dans nos sociétés contemporaines, en particulier la maternité hétéronormative, c’est à dire une femme cis qui tombe enceinte d’un homme cis. Les références à cette forme de maternité sont d’ailleurs quasi permanentes à la télévision, à la radio, sur internet, ou sur les affiches des produits disponibles au supermarché. Pour une partie des féministes, la reproduction est un des sujets liés aux droits des femmes, d’où la notion de “droits sexuels et reproductifs” qui a permis des avancées en matière de contraception et la légalisation de l’avortement dans certains pays. 

Les questions relatives à la reproduction du point de vue de la mère mises à part, une autre tout aussi fondamentale se pose, comment, en particulier en tant que féministe: comment élever son enfant pour que la société patriarcale, capitaliste et raciste ait un minimum d’impact sur lui? 

En effet, si pour plusieurs personnes qui s’affirment aujourd’hui féministes c’est le fruit d’un cheminement personnel constitué d’expériences, de lectures et de discussions qui ont forgé leur pensées et solidifié leurs positions, il est évident aujourd’hui qu’une société égalitaire et équitable pour toustes passe par une éducation feministe, de même que nous apprenons dès l’enfance à nos progénitures que les déchets vont à la poubelle, il faudrait leur apprendre les principes féministe de base qui constituent le socle d’une éducation différente afin d’aller vers le monde plus juste vers lequel nous aspirons. 

C’est l’idée derrière le livre de Chimamanda Ngozi Adichie Chère Ijeawele, ou un manifeste pour une éducation féministe, paru le 7 mars 2017 chez Gallimard. Le livre qui dans sa première version est une lettre adressée à une amie qui avait sollicité l’autrice pour avoir des conseils afin d’éduquer sa fille avec des principes féministes, est un petit texte léger qui se lit en une heure et qui fait en tout quinze suggestions pour une éducation féministe. 

La première suggestion s’adresse au parent, dans ce cas-ci, à la mère. Souvent la maternité hétéronormative déshumanise les mères dans le sens où elles passent d’une personne à part entière, à un simple fonctionnaire dans la vie de quelqu’un d’autre, en l’occurrence de ou des enfants. Ici, l’autrice conseille à celles qui en font l’expérience de continuer à être des personnes pleines et entières. 

« La maternité est un magnifique cadeau, mais ne te définis pas uniquement par le fait d’être mère… Accorde-toi du temps pour toi. Satisfais tes propres besoins. »

L’autrice continue tout le texte pour apporter des propositions qu’elle n’impose à aucun moment comme une science exacte. Elle rappelle que la parentalité est aussi une histoire de découverte et de tâtonnement pour les parents et que c’est ensemble, avec les enfants qu’iels arrivent à un équilibre. 

D’ailleurs, sa deuxième proposition prend en compte le rôle passif qu’ un des deux parents joue parfois dans l’expérience de la parentalité. Elle fait l’analogie entre le verbe qui indique toujours une action et le parent quel qu’il soit, qui doit avoir une posture active auprès de ou des enfants. 

« …Fais taire ton sens socialement conditionné du devoir. Occupez-vous de votre enfant à parts égales. Ce que signifie « à parts égales » dépendra bien sûr de vous deux, et vous devrez vous entendre là-dessus, en prêtant une attention égale aux besoins de chacun. »

Les conseils de l’autrice abordent le genre, la notion d’égalité, le mariage et d’autres sujets qui servent au maintien d’un ordre patriarcal dans le schéma éducatif. Elle parle aussi dans son livre de la lecture qu’elle estime importante à léguer aux enfants. 

L’autrice n’a pas la prétention d’écrire un guide d’une éducation parfaite pour les enfants. Elle pose le doigts sur des aspects qui résonnent avec sa propre expérience et sa socialisation, qui l’ont conduite à être la feministe, noire, africaine qu’elle est aujourd’hui dans un monde où etre une personne sexisée, racisée, du sud global nous prédestine à ce qu’il y a de plus violent. Si elle parle à une personne qui est dans un schéma hétéro de la parentalité, il n’empêche que toutes personnes faisant l’expérience parentale trouvera dans ce livre un écho à une envie d’éduquer autrement, une envie de participer de manière individuelle et collective à créer un monde meilleur.

Melissa Béralus


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