À l’occasion de la Journée Internationale des Droits des Femmes, célébrée hier mardi 8 Mars, huit femmes ont élevé leurs voix pour dénoncer les violences subies par les femmes au quotidien, réclamer leurs droits et chanter l’espoir d’un lendemain meilleur.
20 heures. Faisant office de présentateur, l’ambassadeur de bonne volonté de l’Unicef, Jean Jean Roosevelt, présente finalement au grand public le projet « Rèl Fanm ». Ses longs dreads tombés en cascade, calé dans son fauteuil, la voix de l’interprète de « Connais-tu ? » semblable à un narrateur omniprésent, nous faufile non seulement dans les coulisses de « Rèl Fanm » mais également dans l’intimité de ces huit femmes qui partagent toutes cet élan pour la musique. « Rèl Fanm » reflète la diversité et rassemble huit jeunes talents qui souhaitent embrasser une carrière artistique, qu’elles soient mères célibataires, femmes mariées ou encore des jeunes filles avec des rêves plein la tête.
La diffusion live de « Rèl Fanm » sur diverses pages Facebook notamment celle de l’initiateur Jean Jean Roosevelt, présente les dispositifs d’un mini documentaire. Les participantes commencent par raconter leurs expériences pendant le déroulement du projet, font part des avancées qu’elles ont fait grâce aux formations qu’elles ont suivies et présentent au final leurs propositions. Des propositions toutes aussi originales les unes que les autres, que ce soit dans le décor, la mise en scène et la chorégraphie.
Les chanteuses aux parcours différents
Christina Sybille Calixte est élevée dans une famille adventiste. Avec un père musicien et compositeur, c’est comme si la musique coulait littéralement dans ses veines. Louée également par Jean Jean Roosevelt, l’interprétation de Christina a été, sans aucun étonnement, à la hauteur des louanges qu’on lui attribue. La reine Podium Écoliers 2016 a prouvé qu’une fois de plus ” le fruit ne tombe jamais loin de l’arbre”, comme le rapporte le vieux dicton.
La prestation de Christina a été suivie de l’interprétation de Valencie Etienne. Originaire de Saint Michel de l’Attalaye, Valancie est ce qu’on appelle une artiste confirmée. Dernière arrivée sur le projet, n’ayant jamais travaillé avec Jean Jean Roosevelt auparavant, elle avait vite conquis le coeur de l’interprète de “Agoye” dès son premier essai au studio, raconte le chanteur. Valencie est très intelligente, dit-il. En effet, elle l’est. Créative également, son clip est très original. Tout se déroule comme si elle enregistrait sa chanson au cours d’un live sur Facebook. Habillée d’un sweater et jogger noir, elle accroche son téléphone sur un trépied, part s’asseoir sur une chaise, patiente un moment puis entonne sa chanson sur l’égalité homme- Femme. Les paroles de ce titre notamment ce passage où elle chante ” Stéphanie egal ak Ricardo”, tend à montrer qu’entre les deux sexes, outre les différences physiques, le genre féminin n’est en rien inférieur et a droit au même traitement. La deuxième gagnante du concours Noël Caraïbes 2018 revendique ainsi la valorisation de la femme et le respect de ses droits; une revendication portée aussi par Diasemey Violaine, la fameuse policière du projet ” Rèl Fanm”. En effet, tantôt assise, tantôt debout dans sa sublime robe scintillante, Diasemey chante: ” Ou pap janm ka dim tout sa ou ta vle dim/ ou pap janm ka fèm tout sa ou ta vle fèm/ Mwen se mwen”.
Dans Rèl Fanm, les interprètes crient également assez. Que ce soit Saîka Aristild, enveloppée dans un drap blanc et qui prisonnière par moments de nombreux barreaux, chante ” M bouke”; ou encore Gueytch-Love Vincent qui fièrement assise devant son piano, dévoile les notes de nombreuses blessures et de divers abus. De manière unique, toutes les chanteuses dénoncent avec vélléité les violences faites sur les femmes et les filles. Et par moment, ce qui n’en est pas étonnant, le décor arrive même à nous parler beaucoup plus que les notes de la chanson; ce qui est le cas de l’interprétation de Kettia Philogène. Celle-ci a été précédé de la prestation de Christie Charles. Une Christie sublime dans une combinaison africaine et dont la voix est autant entraînante que le son familier du tambour qu’elle manipule de ses paumes. Pour en revenir, le décor du clip de Kettia est si descriptif qu’on saisit à la seconde ce qu’elle chante. Assise sur un matelas, un rouleau de papier hygiènique sur celui-ci, tenue négligée, Kettia investit un personnage qui touche réellement le fond, abandonnée, seule et meurtrie. Son titre ” Lè w pèdi”, résonne dans la pièce hostile qui n’a guère l’air hospitalière.
La dernière prestation de ” Rèl Fanm” , la huitième, est celle de Lovely Alexis. Drôle, comique, une boule d’énergie sur pied, Lovely avec son clip apporte un souffle nouveau comme si le proverbe disait vrai et qu’effectivement “après la pluie vient le beau temps”. Vive et majestueuse dans sa robe carabela, elle chante: Nou pap lage
Le projet Rèl Fanm
Dans le cadre du projet Rèl Fanm, les huit femmes ont suivi de nombreuses formations sur: les techniques vocales, la présence sur scène…et ont bénéficié également d’un mini studio implanté directement chez elles. Au cours de leurs présentations respectives, elles ont manisfesté leur enthousiasme pour ce studio qui selon toutes, à l’unaminité, leur permettra d’enregistrer leurs chansons à la maison et d’échapper, par la même occasion, à des propositions indécentes assez courantes dans le secteur musical.
Rèl Fanm est supporté par l’Unicef via l’initiative Spotlight, “un partenariat mondial pluriannuel entre l’Union européenne et les Nations Unies, doté d’un financement de 591 M USD et qui a pour objectif d’éliminer toutes les formes de violence à l’égard des femmes et des filles d’ici 2030”. Haïti est l’un des 6 pays bénéficiaires de la région des Caraïbes comme: Belize, Jamaïque, Grenade, Guyana et Trinidad et Tobago.
Jessie Lisa A.R TATAILLE