Vocaliste virtuose et très adulée, compositrice douée, Yanick Étienne qui a déjà bercé des générations de mélomanes amoureux et amoureuses de la pop, aura laissé des morceaux inoubliables, parfumés de poésie, intemporels dont « Mistè damou ».
Yanick Étienne est l’une des plus grandes voix que la musique haïtienne ait enfantées au cours de ces quarante dernières années. En activité depuis la fin des années 70, l’iconique chanteuse de pop et jazz s’est éteinte mercredi 30 mars des suites de cancers du foie et de col de l’utérus, a appris Mus’Elles des sources proches la famille de l’artiste. Cette disparition a laissé un grand vide dans l’univers musical haïtien et étranger, sa renommée avait donc une portée internationale suite à sa collaboration avec le monumental groupe anglais de rock Roxy Music sur le morceau Avalon.
Yanick Étienne est née à Port-au-Prince où elle a fait ses études primaires à l’Ecole Mère Louise des Sœurs de Saint-Joseph de Cluny avant de partir vivre aux Etats-Unis avec sa famille en 1970. Adolescente, sa mère l’avait pressentie pour le chant. Et c’est bien dans les années 1979 qu’elle à fait ses débuts comme professionnelle dans la musique, réalisant au cours de sa carrière quatre albums sur lesquels on retrouve des titres qui ont accompagné son succès, multipliant des collaborations avec un assez grand nombre d’artistes haïtiens et aussi étrangers dont le Roxy Music avec lequel elle s’est produite sur de grandes scènes au Japon, en France, aux USA, en Australie, au Canada…etc. Sa collaboration sur l’album « Avalon » du groupe anglais lui vaudra une reconnaissance mondiale. Yanick a eu, entre autres en 1993, le prix de la Meilleure Nouvelle artiste aux Caribbean Music Awards.
L’œuvre musicale de Yanick Étienne est considérable. Chantée et reprise par de nombreux-ses jeunes, notamment dans des concours de chant, la diva aura nourri l’univers musical de sa belle discographie avec des morceaux comme « Mistè lanmou », « Mwen renmen w » et « Se fanm kreyòl mwen ye » – composition où elle affirme son identité et revendique son héritage afro-caribéen.
Des hommages déposés aux pieds de la diva
Dernst Emile II, rappeur aux Etats-Unis et fils de la défunte, ravagé par le décès de sa mère, a publié sur son compte Facebook ce message émouvant : « Maman, je n’ai jamais pensé à ce que je ferais si ce jour arrivait. J’ai poussé à vivre pour ne pas m’attarder sur le fait que tu nous as quittés. J’essaie de ne jamais remettre en question Dieu et j’accepte que je n’aie pas besoin de tout comprendre. Je dois croire qu’il y a une raison plus grande que les sentiments humains pour laquelle tu devais partir. Alors au lieu d’être en colère contre le monde, je veux te célébrer, et célébrer tout ce que tu as été pour moi, la famille, le monde. Tu es la raison pour laquelle je suis et je te serai toujours reconnaissant. Je suis heureux d’avoir pu te dire une fois de plus que je t’aime, et même si tu n’arrivais pas à mettre les mots ensemble, je savais que tu m’aimais aussi. RIP Yanick Etienne Emile. Je ramène plus de Grammy à la maison si Dieu le veut pour toi ».
Le frère de Yanick, Félix Étienne très touché, a beaucoup de mal à trouver les mots pour exprimer la douleur de cette perte : « Pawòl yo pa ase pou transmèt gwo tristès ak doulè mwen pandan m ap anonse disparisyon sè mwen renmen anpil, Manman Matant ak zanmi Yanick Etienne Senyè a bay e pran, repose nan lapè etènèl nan men Bondye Yane »
De nombreux artistes et personnalités du monde culturel se sont exprimé-e-s à l’annonce de la nouvelle de la mort de l’artiste. Ceux qui l’avaient côtoyée de près comme d’autres ne l’ayant jamais rencontrée physiquement. Chacun a un témoignage vibrant sur sa vie et ce qu’elle représente pour la sphère musicale.
C’est le cas de la chanteuse Fatima Altieri, qui se réjouit d’avoir eu la chance de lui avoir déclaré son amour.
« Travèse nan la pè gran fanm bèl fanm! Ou se youn nan gwo enspirasyon mwen, e mwen kontan ke m te gen chans fè w konnen sa»
Ange Bellie Andou est autrice, elle dit son affection pour cette grande dame et se souvient du temps de sa jeunesse où les chansons de Yanick la berçaient.
« S’il y a une voix pure que j’adore, c’est bien la tienne Yanick Etienne. Depuis mon plus jeune âge, l’or qui sortait de ta bouche me berçait, m’enchantait. Qui ne se laissait pas envahir par ton timbre parfait, tes mélodies douces? Je suis triste de cette grande perte à la culture haïtienne, tu as marqué cette génération Yanick. Je te dédie ta propre chanson, chaque mot est pour toi. Mwen renmenw… »
Ed Lozama, animateur très connu, parle de Yane (ainsi surnommée affectueusement), par une anecdote : « Je n’oublierai jamais ce vendredi soir où Yanick Etienne a honoré Le P’Tit Resto. Alors qu’elle essayait de se fondre dans la foule pour aller incognito, notre MC Jesler Mezidor a commencé à jouer sa chanson à succès Mistè Damou. J’ai attrapé un micro, je suis entré dans la pièce, je le lui ai donné alors que la foule fondait au son de sa voix de velours. Que son âme repose en paix. »
Le maestro Fabrice Rouzier, reconnaissant la dimension de l’artiste, y voit une perte terrible : « Quelle terrible perte. Nous ne nous sommes jamais rencontrés face à face malheureusement mais nous avons souvent interagi sur Facebook. Yanick m’a écrit un message très attentionné quand ma mère est décédée. Je suis profondément attristé par cette nouvelle et je présente mes sincères condoléances à toute la famille. @TAG, @TAG, Dmile85 et la légion de fans à travers le monde. Que Notre Père vous laisse une place de choix à sa table. »
Adlyne Bonhomme
