Restitution des étudiants de « Acte » : chemin croisé entre humour et déshabillement du réel

Spread the love

Les étudiants et les étudiantes de la deuxième promotion de l’école d’art dramatique « Acte » ont présenté leurs travaux de restitution à travers un formidable spectacle le samedi 15 mai 2021 au local du Centre culturel médiathèque à Turgeau.

Il était 4heures 10 de l’après-midi, quand Gaëlle Bien-Aimé, cofondatrice de l’école, a égrené depuis l’entrée de la salle jusqu’à l’estrade, les mots de bienvenue et annoncé toute riante, qu’un groupe qui ferait deux fois la taille de l’assistance attendait dehors. Elle a ensuite brièvement présenté l’institution et le contexte de la soirée au public dont la salle était pleine à craquer et visiblement assoiffé d’un rire.

Le rideau levé, 5 acteurs (Sophia Etienne, Esméralda Dimanche, Alix Olivier, (Rigol) Dieuvela Cherestal, Emmanuela Bazile) ayant déjà été sur les planches, se sont mis à jouer tout de go. Ils ont incarné sublimement leur rôle respectif : chauffeur-femme, rabatteuse de clients (befchenn), agent marketing et passagers. Cela va sans dire, c’est une pièce sur le transport public !

Mise en scène par Gaëlle Bien-Aimée, cette pièce dont la comédienne est aussi co-auteure avec Kevin Cantaveet Amos César, se veut être une radiographie critique complète de la situation du transport public en Haïti. Nourrie d’une sève assez caustique, la pièce évoque tout ce que le transport public comporte de déceptions, de brutalité, de violence et de non-respect des uns vis-à-vis des autres.

Cette pièce, titillant le rire chez les spectateurs, portée par des paroles alertes, ciselées et intelligentes, en plus d’évoquer les tracas du transport public, a d’emblée posé la question de la division du travail dans la société haïtienne, en faisant découvrir des femmes dans des rôles que la société associe la plupart du temps à des hommes.

D’autres étudiants se sont ensuite relayés dans des sketchs individuels, les uns plus puissants, plus acerbes et plus bellement servis que les autres. Si l’on ne pouvait s’empêcher d’avoir un rire large à chacune des paroles prononcées des humoristes, celles-ci n’ont pas manqué d’épingler ceux, cyniques et irresponsables, qui nous gouvernent. Et de sensibiliser par rapport aux regards portés sur les femmes.

Les sketchs ont raconté par ailleurs le désir d’être heureux dans la société haïtienne et l’impossibilité de l’être en passant par des problèmes liés à l’éducation, au phénomène de la migration et à l’absence deservices sociaux de base.

 

Quelque chose d’important a aussi caractérisé les sketchs individuels des humoristes qui se sont défilés dans le cadre de ce spectacle de restitution : la participation concrète de quelques membres du public. Plusieurs membres du public se sont retrouvés en effet à être soudainement en situation d’acteurs, ne serait-ce que pour quelques secondes. Ce qui a aidé davantage à « rendre avec plus d’ingéniosité l’absurde du monde », pour reprendre cette partie de phrase contenue dans le livret distribué avant le spectacle.

Par cette soirée de restitution, on se rend compte que le pays a de quoi jouer une carte sur demain en matière de théâtre et des arts de la scène avec Acte, cette école vieille de 3 ans seulement. 

« Acte » recrute des étudiants entre autres pour les métiers de metteur-se en scène, dramaturge, humoriste et porte le rêve de former des générations d’artistes à Port-au-Prince et partout dans le pays. De faire que les acteurs puissent vivre de leur art, mais surtout par son travail authentique et riche, faire rayonner le théâtre haïtien dans le monde entier.

Adlyne Bonhomme


Spread the love

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *