Kattia Jean François, une journaliste engagée à la cause environnementale en Haïti

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Depuis bientôt 3 ans, Kattia Jean François a fait le choix d’embrasser le journalisme de l’environnement. Un domaine spécialisé du journalisme qui n’est pas vraiment connu en Haïti. Avec le sujet du changement climatique qui fait la une dans le monde, nous vous proposons une interview en toute exclusivité avec la licenciée en Sciences du développement sur les conséquences de ce phénomène en Haïti.

C’est à “Haïti Climat”, le premier media haïtien spécialisé dans la production de contenus sur l’environnement, les changements climatiques et les énergies renouvelables que Kattia Jean François a fait ses débuts dans le journalisme environnemental, à titre de rédactrice et de présentatrice. Pour cette dernière, parler du réchauffement climatique ne serait pas un exercice facile, on pourrait facilement tomber dans une sorte d’alarmisme.

“Ce sont les activités humaines qui constituent la cause principale des changements climatiques, par la combustion de combustibles fossiles comme le charbon, le pétrole et le gaz. Ces combustibles produisent des émissions de gaz à effet de serre qui agissent comme une couverture autour de la terre, emprisonnant la chaleur du soleil en entraînant une hausse des températures. Les émissions des gaz puissant comme le dioxyde de carbone et le méthane qui sont à l’origine des changements climatiques sont issues de tous les pays de planète et concernent tout le monde”, explique la jeune femme.

À en croire celle qui s’est formée sur le tas, certains pays en produisent bien plus que d’autres. Selon les Nations-Unies, les 100 pays les moins émetteurs génèrent 3 % du total des émissions. La part des 10 pays qui en émettent le plus est de 68 %. Par conséquent, cette lutte contre le changement climatique concerne chaque citoyen de la planète, mais il est davantage la responsabilité des pays grands émetteurs d’agir contre le phénomène.

Néanmoins, plusieurs affirment que le réchauffement climatique n’est pas réel, “les climatosceptiques”. À cela, la spécialiste croit que ce sont de simples opinions infondées. Selon ses explications, le dérèglement climatique est une remise en question sur le mode de fonctionnement de notre société capitalise. Les pays industrialisés se trouvent au premier rang des accusés avec leurs exploitations abusives qui endommagent l’écosystème et l’environnement. “Aujourd’hui, si vous parlez par exemple de la transition énergétique, vous allez évidemment mettre en cause la richesse de certains pays parce qu’ils vivent eux-mêmes de l’extraction du pétrole. Pourtant lorsqu’on parle de la transition écologique, on fait appel à une production qui respecte les normes environnementales. De là, on arrivera à un carrefour où l’on se dit que le pays doit sacrifier sa croissance économique pour pouvoir protéger l’environnement et les ressources vivantes, ce qui n’est pas évident”.

D’où la position de certains qui préfèrent nier la présence de ce phénomène. Par ailleurs, Kattia Jean Francois indique que selon les chercheurs le changement climatique est réel, et il remet en cause le système dans lequel nous évoluons. Et l’un des arguments que les climatosceptiques avancent toujours, est que nombreuses des projections climatiques sont faites pour l’horizon 2050, 2100…, il y a de forte chance que ce ne soit pas eux qui vivent à cette époque.  “Cependant je pense qu’il faut aller vers le modèle de développement durable qui satisfait les besoins de la génération actuelle et garantit l’avenir de la génération à venir”, défend-elle. 

Cependant, pour parler de l’impact et des conséquences d’un tel phénomène sur le sol haïtien, la trentenaire préfère jouer la carte de la prudence, estimant qu’il serait risqué de le faire sans des études approfondies. “Ce que l’on sait est que le phénomène existe et les conséquences sont évidentes. D’ailleurs il faudra du temps, au moins 100 ans, pour avoir une base comparative disant que de telles choses arrivent, à cause du changement climatique. Cependant, comme nous sommes sur la trajectoire de l’ouragan et de la saison cyclonique, certaines des conséquences pourraient-être des saisons cycloniques prolongées et intenses, que l’on commence déjà à expérimenter”, argue t-elle en prenant exemple l’ouragan Matthieu, en 2016, qui a saccagé la côte du grand Sud suivi du cyclone tropical Maria qui a causé beaucoup de dégâts en Haïti comme aux Antilles, notamment à Porto Rico et Sainte-Lucie. 

“Autres conséquences des changements climatiques que l’on pourrait citer ce sont aussi des saisons sans pluie causant la perte des récoltes des habitants ruraux, soutient Kattia Jean François. ” 90% de l’agriculture que nous faisons dépend de la saison des pluies, donc s’il ne pleut pas, nous savons déjà qu’il n’y a pas de nourriture car il y a très peu d’irrigation en Haïti, et je crois que 10 % de nos terres sont irriguées, 90% des terres attendent la pluie. En outre, un pays comme Haïti qui a 75 % de son territoire constitué des zones côtières peut éventuellement frappé par l’élévation du niveau de la mer qui est une conséquence du changement du climat”, poursuit-elle.

La Conférence des Parties (COP) qui réunit annuellement des États du monde entier sur les enjeux et défis climatiques avait déposé ses valises l’année dernière à Charm el-Cheikh, en Égypte, entre le 6 et le 19 novembre 2022. Le ministère de l’environnement haïtien a délégué une quinzaine de personnes à la COP 27, une occasion de présenter leur Plan National d’Adaptation aux changements climatique (PNA) aux partenaires internationaux et sa stratégie de financement et de mise en œuvre. À savoir de ce qu’on pourrait esperer de ce récent rassemblement, Kattia Jean François répond. “Maintenant, il reste aux pays industrialisés de respecter leur engagement pour financer les pertes et dommages liés au changement climatique en faveur des pays les plus vulnérables, dont Haïti. Il faut noter qu’en 2009, les pays développés ont pris l’engagement de verser chaque année 100 milliards de dollars aux pays vulnérables à partir de 2020, engagement qui jusqu’à cette dernière COP n’a pas été respecté”.

Ainsi, avec la dégradation de l’environnement qui s’accentue, la deuxième lauréate de la catégorie presse écrite du concours Prix Jeune Journaliste en Haïti de l’OIF souhaite d’une part que ce Plan “conduise le pays réellement vers la résilience aux changements climatiques”  et d’autre part s’attend, “à ce qu’une conscience écologiste soit réellement implantée au sein de notre société, à travers nos messages de sensibilisation, car seule une appropriation totale de la cause environnementale peut nous épargner du danger qui pèse sur notre pays”.Toujours sur la même lancée, la journaliste environnementale, espère que les différents et nombreux médias haïtiens puissent favoriser dans leur programmation “une éducation environnementale plus intense et mettre les dirigeants face a leurs responsabilités.”

Shylene Prempin


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