Des seins qui tombent ! Et alors!!!

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C’est connu que les photos de Sumfest font le buzz, attirent des commentaires, suscitent l’intérêt d’un grand public. En effet, on y retrouve souvent les photos de corps de jeunes femmes, en bikini ou en tenues décontractées. C’est l’occasion pour beaucoup, sexes et genres confondus, d’admirer ces corps au soleil. Pourtant, la section commentaire sous les photos sur les réseaux sociaux, est, cette année, riche en insultes et préjugés sur le corps de ces femmes.

Cette année, ce festival de musique a été organisé, le 28 juillet dernier, à Wahoo Bay, sur la Côte-des-Arcadins. Et les invectives ont été dirigées vers les seins qui tombent. Ticket a publié cette fois-ci, la photo d’une jeune femme arborant des lunettes de soleil et un maillot de bain blanc qui ouvre sur un long décolleté qui montre des seins flasques. Il n’y a pas qu’elle sur la photo. Il y a aussi une autre jeune femme, même tranche d’âge, qui se tient derrière elle, dépose une main sur l’épaule de l’autre, porte un bikini vert avec des seins menus qui se tiennent bien droits. Des internautes se sont donnés à cœur de joie en se défoulant sur les seins de la première jeune femme. Autant dire qu’elle a été totalement réduite à cette partie de son anatomie.

Des commentaires salaces

Ici, on a rassemblé en un petit corpus, certains commentaires des utilisateurs, selon le nombre de mentions « j’aime » qu’ils ont reçus et leurs orientations que nous allons analyser plus bas. Le sexe de la personne qui commente, les commentaires qui sont adressés à Ticket et les commentaires qui n’ont aucun rapport direct avec le sujet présent, ne sont pas considérés ici. Et le corpus se limite aux commentaires laissés depuis la publication de la photo par Ticket sur Facebook, jusqu’à la parution de cette article dans Mus’Elles.

« Pouki kòd tete l long konsa mezanmi ? Se li ki vin reprezante manman bèf yo petèt » ; « Kòmsi la a, si l antre nan dlo ak kòd tete sa a, li pa p koule » ; « Mezanmi makomè a pa t wè si yo t ap fè foto l, pou l te kouri ranje po pat yo » ; « Tete sa a pi long pase sòm 119 » ; « Bon jèn demwazèl sa a, pou tete l gentan paka kenbe kò l » ; « Tete yo sanble kowosòl yo bat ak bouda gode » ; « Elle nourrit les enfants du Bengladesh » ; « Konbyen pitit ti lezanj sa gen, ki fè tete l kraze konsa » ; « Tete grèp » ; « Langue de bœuf » ; « Vizaj la bèl se vre, men sa k blayi a m poko fin konprann li » ; « Vagabon pa vle jenès la rete doubout ankò » ; « Gade yon tete chosèt » ; « Kòd batiman » ; « Manfouben ki nan kò l, gen bikini ak bouraj » ; « Bikini an jis pa stil li se tou » ; « Li ta mete yon adhesive bra ».

Examinons ces quatre déclarations : « Vagabon pa vle jenès la rete dibout ankò », « Bon jèn demwazèl sa a, pou tete l gentan paka kenbe kò l » ; « konbyen pitit ti lezanj sa gen, ki fè tete l kraze konsa » ; « Elle nourrit les enfants du Bengladesh ». Ici, les auteurs de ces commentaires diffamants pensent que c’est à cause d’une intervention extérieure que les seins de la jeune femme sont devenus flasques. La première assertion suppose que la cause s’origine dans l’acte des partenaires sexuels qu’elle aurait eus. Dans l’ombre, on voit bien qu’ils font, aussi, allusion aux pratiques sexuelles de la jeune femme. La deuxième assertion, fait la relation entre jeunesse et les seins qui s’étalent, et de-là, insinue que ce sont des seins de femmes âgées. La troisième et la quatrième assertion, imputent la responsabilité à la maternité et à l’allaitement. Et détail important, ces personnes croisent les informations, nombre d’enfants que la femme a eus, ou qu’elle allaite qui doit correspondre à la taille et la forme des seins.

Continuons notre analyse, avec ces deux autres remarques : « Vizaj la bèl se vre, men sa k blayi a m poko fin konprann li » ; « Mezanmi makomè a pa t wè si yo t ap fè foto l, pou l te kouri ranje po pat yo ». La première, déclare carrément ne pas « comprendre » les seins de la jeune femme. C’est une chose informe, laide, qui est incompréhensible et qu’il faut cacher. Et c’est ce que la deuxième assertion invite la jeune femme à faire, en lui demandant de les « arranger » convenablement pour se faire prendre en photo.

Prenons ce groupe d’allégations suivant : « Pouki kòd tete l long konsa mezanmi ? Se li ki vin reprezante manman bèf yo petèt » ; « Tete grèp » ; « Langue de bœuf » ; « Kòmsi la a, si l antre nan dlo ak kòd tete sa a, li pa p koule » ; « Tete sa a pi long pase sòm 119 » ; « Tete yo sanble kowosòl yo bat ak bouda gode » ; « Gade yon tete chosèt » ; « Kòd batiman ». Elles sont réunies, car leurs propriétaires avec des images les plus colorées que d’autres, condamnent une seule et unique chose : « la longueur » des seins de la jeune femme. Comme s’il y avait une « longueur » maximum que les seins doivent atteindre, qui est dictée par l’Etat, par le corps médical, par la religion ou n’importe qu’elle instance supérieure qui régît le corps social.

Quant aux dernières assertions : « Manfouben ki nan kò l, gen bikini ak bouraj » ; « Bikini an jis pa stil li, se tou » ; « li ta mete yon adhesive bra ». Elles font l’apologie des produits de l’industrie de la mode qui dictent les codes de beauté. Des soutiens de gorge conçus très souvent au détriment du confort des femmes, soi-disant pour dissimuler les imperfections des seins parce qu’ils ont des formes ou des tailles différentes de leurs normes établies. Des bikinis produits pour « ces catégories de seins », pour les rendre convenables, acceptables. Ces commentaires peuvent paraître moins injurieux que les autres, mais l’idée derrière reste la même, que les seins de cette jeune femme méritent un traitement particulier parce qu’ils ne plaisent pas à l’opinion publique.

À bas la diversité !

Nous avions scruté ces différents énoncés, dans l’acception Benveniste du discours, qui le comprend en tant que langage mis en action, un espace supérieur à la phrase qui fait référence à tout un réseau de signifiance (espace, sonorité, couleurs, gestualité et autres pratiques diverses). Des notions d’inter discours, de dialogisme, de polyphonie et de positionnement n’ont pas été prise en compte ici dans cette analyse, car il faudrait réaliser toute une étude.

En analysant les différents discours de type « commentaires » de ces utilisateurs, on se rend compte que les préjugés sont profonds, et les connaissances des gens sur cette question sont très limitées. Hommes et femmes haïtiens, ne savent pas que les seins grossissent, grandissent, se modifient autant que toutes les autres membres et parties du corps de la femme, avec l’âge. C’est absurde d’exiger qu’elle conserve la même forme, la même taille depuis ses 15 ans jusqu’à ses 20, 30, 40 ans, enfin toute sa vie. Nos corps, pas seulement celui des femmes, changent sous l’effet du temps, de la maladie, dont les seins qui en font partie, également.

Comme vous pouvez le constater dans le paragraphe ci-dessus, toute la beauté de la langue créole est utilisée ici pour déprécier, vilipender, rabaisser, et avilir le corps de cette femme. C’est le résultat d’une culture de l’uniformisation du corps des femmes, par les médias, le cinéma et la mode. Une logique qui enseigne que les seins n’existent que pour assouvir les fantasmes des hommes. Et quand la réalité ne correspond pas au rêve vendu, imposé, par les grosses industries et opinons préconçues, les injures pleuvent. Une poitrine se doit d’être ronde et droite. Les poitrines se doivent de n’être pas trop petites ou espacées, pas trop grosses, ni généreuses, non plus débordantes, ou amputées. C’est ce qu’on attend des poitrines des femmes. Le message est clair. À bas la diversité !

Pourtant, il y a des millions de tailles, de formes, de couleurs et d’autres spécifiés. Les seins n’ont jamais été une question insensible ou neutre pour leur détentrice. Elles ne leur ont jamais vraiment appartenu. À la puberté, c’est le signe qu’elle est en train de devenir femme, l’objet de tant de désirs contenus, des fruits qui vont bientôt mûrir. À l’âge adulte il peut s’apparenter à un objet sexuel, érotique, destiné à attirer les regards, les commentaires, les mains, les lèvres de l’autre. C’est aussi, un outil d’alimentation des nouveau-nés, si elle devient mère par choix ou par un malheureux hasard. Et à la fin, c’est très souvent le gagne-pain de son médecin, qui va la gaver de prédictions néfastes sur toutes les façons que ses seins peuvent la tuer.

Croyez-le ou non, mais les femmes oublient souvent leurs seins, se désintéressent de leur existence. Avec de nombreuses préoccupations en tête, il y a peu de place à les accorder. Pour cela, recevoir des commentaires à longueur de journée sur sa poitrine, agace. Être obligée de reconsidérer sa tenue à chaque fois pour ne pas attirer l’attention sur ses mamelons, c’est fatiguant. Être en pleine conversation, et se rendre compte qu’on est qu’une paire de mamelles sur patte, est totalement dérangeant. Sans oublier la nature des commentaires, les effets que cela peut avoir sur l’estime de soi. Et on parle en connaissance de cause.

À cette jeune femme, si vous avez l’occasion de lire ce texte, sache que ta poitrine n’a rien à envier à d’autres en dépit de la clameur publique ! Nous ne sommes pas les seules à le dire, tapez #SaggyBoobsMatter et vous verrez des photos de milliers de femmes aux seins qui tombent, qui n’hésitent pas à les afficher, car elles se considèrent belles comme elles sont. Cet hashtag initié par la bloggeuse Chidera Eggerue (TheSlumFlower), dont la photo illustre l’article, a fait le tour du monde. Elle a renoncé à la chirurgie esthétique, elle vit pleinement ses seins qui tombent et invite toutes les femmes, dans la même situation à faire de même.

Hervia Dorsinville

dhervia04@gmail.com


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12 Comments

  1. Avatar
    Monge

    Moi les nichons qui pendouillent pour les femmes je trouve trop sexy et au moins ils bougent et sous une robe et sans soutien-gorge je trouve très excitant.

  2. Avatar
    Djoune

    On atik ki gen fom ak fon. Ki raplem tou de tres mauvais souvenir paske mte gon mennaj ki te kitem paske zanmil te trouve msanble manman 10 pitit poutet tetem gwo. Li t kitem pou yon lot ki t gen ti tété paske zanmil pat renmenm pou li. Mwen le yo relem manman bef Li pa deranjem paske valeur mw pa dépann ni de tetem ni de grosseur mw. E anpil medam yo kap kritike dénigre lot fanm parey yo anpil nan yo paka fe on bon analyse defann on bon these. You kwe nn corps yo plus ke cerveau yo.
    Chak moun son moun peu importe morphologie li. Avec ou sans gwo tété nou se humain nou se femme…

  3. Avatar
    Gamaelita

    Aie le courage d’Assumer vos Corp tel quel est .

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    John Guyve

    Mete nan bòl yo Hervia.

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    Djenny D’jenane’s Alexandre

    Ayisyen vreman pa konn sa yo
    Vle
    Le yo pa pale de tetew se de grosew (pou grosè a mw se yon viktim )
    Ou bn aksyonw
    E si tout fwa ou dwat yap pale de gref ou bien zong ou
    Antouka
    Mw dako avew
    “Nou tout diferan “
    Yo pa Demokrat ase Pou yo konprann sa

    1. Avatar
      Carlande Pierre

      Il n’y a pas mieux que notre peuple quand il s’agit de déniger les autres et pis encore on trouves des commentaires néfastes faites par des femmes.. Ils sont toujours content du malheur de l’autre et voilà pourquoi ils cherchent toujours à inventer des histoires au détriments des autres sans penser au mal qu’ils font.. J’encourage toutes les femmes à être fière de leur corps et à s’assumer toute entière.. Nous ne sommes pas que des objets sexuelles!!! Il est temps de nous affirmé et de montrer aux hommes que nous sommes bien plus que ça.. Rutchelle Guillaume l’a fait Emeline Michelle et tant d’autres femmes dans le monde entier.. Ne les regardons pas seulement comme des vedettes mais imitons aussi leur force de caractère leur courage et leur épanouissement en tant que femme!!!

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    Shilove Pyram

    ??????Les seins ne peuvent pas rester ” doubout “durant tout le long de la vie . Les seins de vos mamans sont ils toujours rebondis et gonflés ? c’est juste qu’ils n’acceptent pas la diversification ! ils creent toujours un moyen pour denigrer les autres .

    1. Avatar
      Lucrece polynice

      Antouka se sak ta poufèl fè gwo konenn hittt sa. Limet di tetel Merci. Sil te kachel lipatap popilè konsa. Kounya sil vle f yon muzik kounya lita rele tèt li
      FANM TETE a .preske tout moun ap konnenl c sa sosyete a ofri ankouraje diskriminasyon. Koulè peyi koulè dirijan koulè jenès koulè mantalite.

      Aba diskriminasyon

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    Okodjo

    Se vre ke sen yo ap modifye ou altere ak aj,Si moun nan ap alete timoun etc. men pa nan eta kem wè tete yo pakèt ti jen demwazel sa yo.So fok ou etidye anatomi tete an!Sa ka vini pa anpil mal pratil inkli pratik seksyel…..

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    Hulms BE

    De manière générale, j’évite toujours de faire des commentaires sur les réseaux sociaux importe que j’aime ou j’aime pas la publication. Par ailleurs, Cette image suivie de commentaires néfastes ne m’a pas quitté l’esprit depuis le jour où je l’ai vu! J’ai pas cessé de penser aux standards que la société a fixé en ce qui a rapport à la beauté et l’acceptance féminines. J’ai dû conclure qu’il nous reste encore beaucoup de chemin à faire en vue d’éradiquer ces complexes qui certaines fois nous ruinent l’âme.

    Excellent Travail!

    En voici encore une femme forte….

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    Sophia

    Malheureusement les haïtiens ne savent ni apprécier ni supporter, quand ils parlent ils ne pensent aux conséquences de leurs propos. Je pense que chacun a le droit de rofiter ,d’accepter et de montrer son corps (sans être vulgaire pour autant)
    Soyez fière de ce que vous avez, aimez vous comme vous êtes si les autres ne sont pas d’accor on s’en fou.

    1. Avatar
      Mabio

      vous avez dit “les Haïtiens”je ne suis pas de votre avis parce qu’ils ne pensent pas de la même façon.”la plupart des Haïtiens “c’est mieux.Ne généralise pas svp

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