Barbara Baptiste: Parcours d’une couturière chevronnée

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Barbara Baptiste est une des petites mains de la mode. Pour celles et ceux qui ne la connaissent pas, ce nom a laissé son empreinte lors d’un défilé de Karl Lagerfeld en 2016. Lors de ce rendez-vous select, le designer allemand tenait à la célébrer parmi ses couturières, véritables artisanes de ses œuvres. De plus, son parcours est des plus inspirants.

Barbara Baptiste, résidant en France et trainant derrière elle 35 années d’activités dans la haute-couture et le prêt-à-porter de luxe, a fait ses débuts dans les ateliers de la maison Lacroix. Elle y restera jusqu’à sa fermeture en 2009, avant de rejoindre, en 2010, la maison Chanel. Aujourd’hui, elle est couturière hautement qualifiée et  maîtresse d’apprentissage.

Son métier ne consiste pas seulement à tailler et à confectionner à souhait des vêtements, mais de matérialiser les œuvres d’art comme ceux d’Elie Saab ou de Fabrice Roland, des créateurs qu’elle admire. Elle avoue qu’en entrant chez Lacroix dans les années 1980, elle ne s’attendait pas à la charge que représenterait de travailler en haute couture et prêt-à-porter de luxe. Les souvenirs flottent alors dans sa tête : jeune fille de 18 ans, à peine avoir passé son CAP et son BEP[1] en couture vêtements sur mesure et création couture flou, elle a fait son entrée dans le monde de la mode. Elle a débuté comme couturière deuxième main et débutante.

Son plus vivant souvenir de cette période de débutante à la maison Lacroix reste la maîtrise des tissus crêpes. Elle héritait à chaque saison des vêtements crêpes qui furent un véritable calvaire à manipuler. Elle sentait la pression à chaque saison de sa cheffe d’atelier pour qu’elle réussisse non seulement à manipuler ce tissu mais à rendre un travail conforme à la vision du designer. Cette pression de réussir toutes ces créations la rendait hésitante à rester dans la haute couture, il y a 35 ans. Aujourd’hui elle n’imagine plus de reconversion professionnelle. Pour Barbara, c’est la haute couture ou rien.

Elle a gravi tous les échelons et il ne lui reste qu’à être première d’atelier. Un poste que celle qui a cousu la robe que Lady Diana portait au Petit Palais de Paris en septembre 1995 es fier d’avoir voué toute sa vie à un métier qu’elle embrasse avec amour et passion.

Elle est toujours satisfaite d’être l’artisan de ces rêves sur mesure et de rendre possible la vision de tant de créateurs. Elle a parcouru le chemin inattendu en couturière de luxe. Au chevet des clients de Chanel, Barbara, seule ou accompagnée, voyage pour apporter le luxe aux portes des privilégiés. Ses fréquents déplacements pour assurer les dernières notes sur les essayages et les habillages, lui rappellent souvent qu’elle a effectivement fait le bon choix de carrière. Avec cette vie tant mouvementée, elle a cependant gardé des liens avec Haïti.

Elle se rappelle de ses magnifiques rencontres à la Haiti Fashion Week  qui ne se tient plus et qui lui a permis de découvrir tant d’œuvres de créateurs haïtiens qu’elle apprécie particulièrement comme celles de Miko Guillaume ou David André. Elle a également travaillé avec Maëlle Figaro David, celle qui a confectionné les costumes des athlètes Haïtiens aux Jeux Olympiques de 2020 à Tokyo. Barbara a également habillé James Germain et espère à l’avenir avoir des possibilités de contribuer avec beaucoup plus de créateurs haïtiens.

Les conditions actuelles ne permettent pas le développement de la mode, et de fait, Haiti échappe aux débats sur les impacts environnementaux du prêt-à-porter rapide, sur la surconsommation ou encore de l’utilisation du cuir animal. Les conditions de production ne sont pas optimales et le débat actuel se porte sur les usines de sous-traitance. Le travail de ses usines au lieu des maisons de couture empêche une valorisation du travail  des artisans et des créateurs. Ceci n’encourage pas les discussions sur la mode en Haïti et même d’une mode haïtienne. Le made in Haiti traîne encore.

Elle espère toutefois un investissement plus important dans le prêt-à-porter de luxe, soulignant que la Haute Couture n’est pas une source de profit mais constitue plutôt un élément symbolique pour les maisons de couture qui mettent en avant leur travail créatif et leurs techniques. D’autant plus que le travail complexe des vêtements de haute couture fait presque exclusivement à la main, demande un temps qui rend la commercialisation impossible. Ce genre de création reste presque sur mesure, exclusif et inaccessible mais le spectacle offert fait que le jeu vaut toujours la chandelle.

En attente de nouvelles connexions avec son pays natal, elle continue de mettre à profit ses compétences en terre étrangère comme formatrice pour Chanel. Transmettre les ficelles du métiers et donner vie aux croquis, occupent sans le dire, la majeure partie  de ses heures de travail.

Déborah Douyon


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