Angela Davis, une vie de combat

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Symbole de la lutte pour les droits civiques aux États-Unis, Angela Davis occupe une place primordiale dans l’histoire des luttes pour l’émancipation des peuples. Féministe, antiraciste, marxiste, elle marque de ses empreintes les révoltes des mouvements sociaux contre les discriminations et les injustices dans le monde. Un portrait d’Angela Davis pour ambitionner le combat contre la domination du capitalisme. Un portrait pour saluer le combat d’une militante admirable qui ne cesse de clamer qu’« Haïti est la racine de la liberté ».

Les années passent, les mouvements de protestation contre la ségrégation raciale se multiplient partout. Toutefois, les comportements racistes perdurent à travers le monde, notamment aux États-Unis. Essayer de recenser le nombre de victimes d’actes racistes seulement pendant la dernière décennie serait un exercice qui n’en finirait jamais. Par contre, on ne saurait ne pas saluer la mémoire de Georges Floyd, l’une des récentes victimes du racisme institutionnalisé aux États-Unis, tué le 25 mai 2020 par un policier xénophobe. La mort de Georges Floyd marque un tournant dans les colères populaires contre les violences policières en Europe et en Amérique du Nord. Ces événements ont donné un nouvel élan aux batailles contre le racisme dans le monde.

Dans ce contexte, l’engagement d’Angela Davis transmet l’optimisme de dénoncer les violences faites aux femmes et aux filles. Camper le portrait d’Angela Davis aujourd’hui permet de remémorer une figure emblématique contre la guerre dans le monde. Sa figure inspire l’espoir de promouvoir la paix. L’objectif est de tirer de son combat contre les inégalités sociales des enseignements utiles à la construction d’un monde égalitaire. Donc, il est possible d’apprendre de cette icône de l’insoumission contre l’arbitraire. Ceci concerne généralement sa fougue intellectuelle, ses écrits, sa « rébellion » ordinaire, ses luttes féministes, ses engagements politiques marxistes et civiques.

Une voix contre le racisme et le sexisme
Née le 26 janvier 1944 à Birmingham, en Alabama, dans une famille afro-américaine, Angela Davis a subi des humiliations et des actes racistes dès son enfance. Enfant sa grand-mère lui racontait déjà l’histoire de ses parents qui étaient eux-mêmes esclaves. Jeune femme intelligente, elle était obligée d’évoluer quotidiennement dans un climat de violence raciale dans le Sud des États-Unis en pleine ségrégation. Elle ne va pas à l’école avec les blancs, n’a pas accès aux parcs publics, mais découvre les livres. Très tôt elle fait face au sexisme des leaders masculins qui confondent selon elle « leurs activités politiques avec l’affirmation de leur virilité ». Très jeune Angela suit les traces de son père et de sa mère Franck et Sallye Davis, des activistes connus aux États-Unis. L’origine d’Angela Davis n’est pas sans conséquence dans ses combats contre le racisme. Sa curiosité inspirée l’amène à déceler et à questionner fréquemment les différentes formes de violences dans la société étatsunienne tout entière. Ce qui explique que des années plus tard elle a fait partie du mouvement Black Panther Party for Self-Defense (BPP), qui a repris la lutte pour les droits des Noirs entamée par Martin Luther King, Rosa Parks et tant d’autres. Elle est incarcérée et mise en cause, durant l’année 1970, pour son engagement comme l’un des membres les plus influents des Black Panthers. Une fois sortie de prison en 1972, Angela Davis a commencé avec la publication de ses essais et de ses discours qui font d’elle l’une des intellectuelles radicales les plus connues de l’époque.

L’héroïne du Black Power reste aux côtés de Malcolm X et de Martin Luther King, l’une des figures emblématiques du mouvement pour l’egalité aux États-Unis. Angela Davis devient une femme instruite et cultivée qui, en plus de son doctorat honoris causa, enseigne la philosophie à l’Université qui est un atout de taille pour transmettre ses connaissances et surtout son esprit critique. Elle a écrit une quantité de livres pour appuyer ses luttes dont le célèbre ouvrage titré « Femme, race et classe » (1981). Elle connait également le militantisme et le féminisme, ce qui lui permet de s’adapter aux situations de négociation avec une connaissance parfaite des enjeux politiques et sociaux. Ces derniers n’avaient aucun secret pour elle, et elle s’en servait pour résister face aux adversaires.

Le racisme, un cancer mondial à combattre
Attiana Jefferson tué le 12 octobre 2019, Philando Castile le 6 juillet 2016, Michael Brown, en 2014 à Ferguson, Trayvon Martin le 26 février 2012, Georges Floyd le 25 mai 2020, tous victimes du racisme aux États-Unis. Cependant, il s’agit là d’un problème qui concerne le monde et pour arriver à l’éradiquer, l’humaniste Angela Davis préconise une solidarité qui doit être mondiale. Les mouvements de protestations sont à encourager, cependant ces soulèvements ne doivent pas s’arrêter là. Le changement doit pouvoir être ressenti dans le comportement individuel de chacun-e des citoyen-e-s si non la bataille sera vaine. La militante soutient que le racisme est d’ordre structurel et systémique, donc il est ancré dans les attitudes individuelles et les représentations collectives, ce qu’il faut nécessairement éliminer.

Pour l’activiste féministe, « les mouvements de contestations occasionnés par la mort de Georges Floyd sont un plus à gagner dans le combat contre le racisme et une progression pour les acquis démocratiques ». Dans un entretien accordé à Radio Canada, Angela Davis déclare « qu’elle a vécu et connu le racisme sous ses formes les plus cruelles, cependant c’est la première fois qu’elle assiste à une réponse aussi immédiate, à un tel soulèvement contre un meurtre raciste presque partout dans le monde. Bien sûr les nouvelles technologies de l’information et de la communication en sont pour beaucoup, quand bien même il s’agit d’un pas vers l’avant dans la lutte pour le respect des noirs en tant que humains ».

Une figure emblématique du féminisme
Aujourd’hui, Angela Davis reste un repère culturel et une figure historique essentielle dans la compréhension des formes de domination patriarcale et machiste. En effet, elle a compris très vite que la lutte contre le racisme ne saurait exclure le combat pour le respect des droits des femmes. Pour celle qui a visité Haïti en 2016 lors du congrès du Caribbean Studies Association, la lutte pour les droits civiques des communautés subalternisées et le féminisme sont intimement liés. Tout comme la combattante pense que les questions de sexualité, de race, de classe et de genre sont intimement liées. Courageuse, fougueuse et déterminée, cette féministe de la première heure impose une vision évolutive de la place de la femme dans les sociétés contemporaines. Arborant la notion « d’intersectionnalité des luttes », elle s’interroge sur les luttes de libération et d’émancipation des femmes noires, et elle en conclut qu’elles ne peuvent réussir qu’en luttant en même temps, contre le racisme, le sexisme et les questions de classe.

Redoutable stratège et rebelle, sa praxis consiste à analyser les mouvements sociaux contre le racisme et l’injustice comme des actions au cœur de la lutte pour la démocratie sociale. La promesse que la vie de tous les êtres humains doit compter est sa principale monnaie d’échange. Il s’agit là d’une lutte fondamentale visant à déraciner le sexisme, l’homophobie, la transphobie, la discrimination économique et, pour beaucoup d’entre nous, un dissentiment contre le capitalisme. Grâce à son courage, à la force de ses idées et de sa persévérance elle a lutté, et lutte encore, pour faire de notre monde, un monde meilleur.

Durant ces moments d’incertitude, la mémoire d’Angela Davis doit être rappelée dans la société haïtienne, où les femmes sont relativement sous représentées dans les institutions. D’ailleurs, l’esprit de résistance et de liberté d’Angela Davis dépasse les frontières étatsuniennes en devenant un symbole mondial de la lutte contre l’iniquité. Enfin, elle incarne, aujourd’hui encore, une figure centrale de l’histoire des luttes pour la liberté. Enseignement, engagement révolutionnaire, combat politique, style iconique, coupe afro et poing levé, tant de styles et de domaines portés par une volonté commune : prôner l’égalité et l’émancipation.

Nakisha Jean
jeanakisha.nj@gmail.com


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